jeudi 1 septembre 2011

BATTLE HYMN OF THE TIGER MOTHER


BATTLE HYMN OF THE TIGER MOTHER
  
Il y a tellement de choses à dire sur ce livre qui a soulevé la polémique aux Etats-Unis à sa sortie que je ne sais pas par quel bout commencer. Une chose est sûre, ceux qui critiquent l'auteure, Amy Chua, avec véhémence, n'ont certainement pas lu le livre jusqu'au bout et ont même dû s'arrêter aux deux premières pages.

Au final, j'ai trouvé que c'était un récit profondément touchant d'une famille sino-américaine, et plus particulièrement d'une mère, dont le seul souci est de donner le meilleur à ses enfants et leur assurer un avenir dans ce monde plus cruel que convivial. Et n'est-ce pas ce à quoi chaque parent aspire, chacun à sa méthode?

Ce qu'on lui reproche dans l'éducation à la chinoise qu'elle préconise: brider les désirs des enfants, empêcher leur épanouissement personnel, ne leur laisser aucune liberté, créer des enfants-robots qui excellent peut-être académiquement, mais qui ne développent aucun esprit créatif, et surtout, gâcher leur enfance en exigeant trop de leur personne.

Quelque part, c'est une éducation qui est toute à l'image de la société chinoise, où le respect de l'autorité des aînés est un principe acquis. C'est culturel, c'est une société où il est naturel d'obéir, de respecter et d'avoir de la reconnaissance envers ses parents, impensable de leur dire merde ou de les déshonorer de quelque façon que ce soit. Plus particulièrement chez les familles immigrées, la transmission de ces valeurs, auxquelles il faut rajouter celle de l'apprentissage du dur labeur bon gré mal gré, est d'autant plus fondamentale qu'elle est basée sur de nombreux sacrifices de la part des parents. Dans une société compétitive qui fait très peu de cadeaux, il faut être armé pour y survivre dans les meilleures conditions.
  
Personnellement j'ai beaucoup aimé le personnage d'Amy Chua. Elle est complètement "folle" (du point de vue occidental que je rejoignais parfois dans certains cas), barge, hallucinante, mais irrésistiblement attachante et touchante. Elle assume totalement ce qu'elle est et fait, sa mission est d'élever ses enfants, et elle s'y tient sans se laisser distraire. J'étais complètement fascinée par cette volonté de fer, cette conviction inébranlable de bien faire, le découragement est une notion qu'elle ne connaît pas là où ses filles sont concernées, et si ces dernières devaient la haïr pour ses pratiques, et le monde la juger, qu'importe, elle aura fait son devoir de mère.
  
Pour extrêmes que sa rigueur et sa discipline puissent paraître, en réalité, personnellement je suis plus pour ses méthodes éducatives (en peut-être un poil plus souple ^^) que la méthode des parents qui pardonnent tout et récompensent leurs enfants à la moindre bêtise pour avoir la paix, ou les délaissent parce que c'est plus facile et que ça prend du temps d'élever des enfants.... Un laxisme qui fait ses preuves parmi la nouvelle génération qui nous fait parfois halluciner, sans vouloir généraliser (cf Chroniques d'une prof qui en saigne de Princesse Soso par exemple).
  
Un point très important que j'aimerais souligner car vraiment je ne m'y attendais pas: je pensais que ce récit allait être un long sermon dans lequel Amy Chua allait démontrer la supériorité de son éducation de mère-tigre sur l'éducation à l'occidentale, quelle erreur!
Ce récit est finalement l'histoire d'une famille biculturelle, avec ses hauts et ses bas, et les efforts d'une mère pour accomplir son devoir. A ce niveau, ça s'assimile plus pour moi à un témoignage et une réflexion sur l'application d'une méthode éducative (qui fait ses preuves en Chine) et ses difficultés dans un contexte qui ne s'y prête pas forcément bien (société américaine), avec ses conséquences sur l'entourage, ses propres enfants et sur soi.
C'est instructif culturellement parlant, captivant, très intéressant, et surtout, c'est un récit qui ne manque pas d'humour. Je ne m'attendais vraiment pas à rire autant! Au début, je me demandais si c'était voulu où si c'était simplement le décalage culturel qui rendait les choses aussi drôles, mais Amy Chua a un sens de l'auto-dérision confirmé, et son récit m'a vraiment beaucoup amusée tout le long, tellement les situations décrites sont décalées et surréalistes.
  
L'épisode qui m'a le plus marquée, c'est celui des cartes d'anniversaire de ses filles. Là je me suis dit, "elle est grave quand même!", mais je n'ai pu m'empêcher de trouver ça très drôle, et à la réflexion, je me dis qu'elle n'avait pas tort (juste, elle manque de tact notre Amy ^^).
  
C'est une forte personnalité que celle de cette femme à la base, et c'est amusant d'ailleurs de voir qu'ayant elle-même eu cette éducation très stricte, elle soit si peu malléable et soumise en réalité, au contraire, c'est une femme clairement têtue, déterminée, et visiblement épanouie.  Ça m'a bien amusée aussi de voir que ses parents avaient un autre comportement avec ses enfants (ce qui l'écoeurait - elle m'a bien amusée là aussi!) mais ça je crois que c'est le propre des grands-parents - méga sévères avec leurs enfants, et top cool avec leurs petits-enfants.

Et j'ai bien aimé aussi l'éternelle confrontation avec Lulu, la cadette obstinée qui n'en fait qu'à sa tête. Deux caractères forts qui s'affrontent et se tiennent tête, c'est un sacré spectacle. C'est d'ailleurs ce qui a fortement contribué à rendre ce récit palpitant, intéressant, et intense en suspense (si si - la fin est formidable!).

J'ai été aussi intriguée par le mari, Jed Rubenfeld, qui est cité à maintes reprises pour les romans qu'il aurait écrit, dont un à succès, L'interprétation des meurtres. Pas lu, mais curieuse maintenant.

Enfin, aucun signe de traumatisme, ni de rancoeur ne semble visible chez les enfants, bien qu'Amy Chua ait eu chaud avec sa cadette. C'est une famille qui s'affiche soudée, moderne, heureuse, et Sophia, l'aînée, tient même un blog où elle tourne toute cette polémique en dérision et semble dotée d'un grand sens de l'humour également. 
La chance de ces enfants, c'est peut-être aussi cette biculturalité, le père, Juif Américain, étant relativement "cool", et la mère, bien que d'ascendance chinoise, ayant tout de même grandi aux États-Unis.

Bref, personnellement je ne comprends pas bien cette polémique envenimée autour des mères-tigres, je ne les trouve pas pires que les mères-poules, chacune ses extrêmes, chacune ses qualités, chacune ses erreurs, l'important est que chacun essaie d'élever ses enfants au mieux, que les actes soient dictés par l'amour. Pour moi, c'est ça qui compte, la responsabilité qu'on prend d'avoir mis des enfants au monde, plutôt que l'indifférence. 

 La question quant à la meilleure éducation à prodiguer reste en suspens cela dit.  
  
A paraître chez Gallimard sous le titre L'hymne de bataille de la mère Tigre. Date de publication non communiquée.

Amateurs du sujet et non réfractaires à la VO, je le fais volontiers voyager en attendant.  

EDIT 25/09/11: date de parution Gallimard annoncée au 02 novembre 2011.

Également commenté par Keisha et Cédric Jeanneret.

6 commentaires:

  1. Ben écoute, là ça m'intéresse (au fait, tu as terrassé ta PAL express? total respect!), de temps en temps j'aimerais bien que certains parents d'élèves soient un peu plus mother tiger avec leurs mômes... et moins OKOK tu l'auras ton téléphone dernier cri. Si j'ai bien compris l'histoire, quoi, que je découvre avec toi. Un petit saut sur le blog de la fille mem ontre qu'elle a l'air bien dans ses bottes...

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    1. Oui, elle a l'air vraiment équilibrée, intéressante, intelligente (j'ai vu dans un de ses billets qu'elle lisait Guerre et paix!^^ A 17-18 ans...). Ce livre tourne beaucoup autour de la musique aussi, l'aînée jouant du piano, et la cadette du violon, et j'ai trouvé les chapitres consacrés à ces disciplines vraiment passionnants. Bon, après la mère est franchement extrême par moment, une vraie "control freak", mais ce qui est intéressant, c'est que ce livre montre que beaucoup de facteurs entrent en jeu dans l'éducation.'On ne peut pas courber la volonté et le caractère des enfants aussi simplement qu'on le souhaiterait. Les enfants ont une vraie personnalité dès la naissance et les parents ne peuvent pas en faire juste ce qu'ils veulent. Ce qui explique peut-être la difficulté de certains parents à se faire respecter et l'abandon de la bataille dans nos sociétés.
      Enfin bon, je ne t'en dirai pas plus, tu verras bien! :)

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    2. le 2 novembre, je ne sais plus où j'ai vu ça!
      Bon, je suis allée voir le blog, le voyage en chine, et comment ça se passe là bas. Interessant. Mais comme je ne sais pas comment sont éduqués les mômes là bas;.. Les chinois n'hésitent pas à passer devant dans les sites touristiques, de toute façon, et là j'ai dû balayer des décennies de bonne éducation berrichonne...^^

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    3. Pour la date, c'est confirmé sur Amazon. Je ne sais pas si c'est fiable par contre, et puis ça peut changer pour diverses raisons...
      Je ne suis pas experte non plus sur la réalité de l'éducation à la chinoise en Chine, et de ce que j'ai perçu chez Sophia, ils ont eux aussi mal interprété les propos d'Amy Chua.^^ Oui, les Chinois ne sont pas vraiment réputés pour leur politesse et amabilité mais je crois qu'au sein de leur communauté, il y a un vrai sens du respect envers les aînés et la notion du dur labeur ne leur fait pas peur.

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    4. En Afrique aussi, respect des ainés... Mais comme tout se perd, est ce encore exact dans les grandes villes?

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    5. Bonne question! Tout se perd, comme tu dis... sans vouloir généraliser.:)

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