lundi 20 octobre 2014

SEPT ANNÉES DE BONHEUR


SEVEN GOOD YEARS

( SEPT ANNÉES DE BONHEUR )

traduit de l'anglais (Israël) par Jacqueline Huet
et Jean-Pierre Carasso

Après avoir goûté de l'oeuvre d'Etgar Keret via Pizzeria Kamikaze, j'avais déclaré à l'époque que j'étais assez curieuse de découvrir ses autres livres tant il me semblait un auteur intrigant et intéressant.
C'est 6 ans plus tard que je me repenche enfin sur son univers et mon choix s'est porté un peu par hasard sur ce recueil à travers lequel l'auteur relate sept années de sa vie à Tel-Aviv.
Choix risqué pour moi qui ne suis pas très nouvelles à la base, ni très récit type autobiographique/autofiction, mais je dois dire que la première phrase de la 4è de couv' m'a tout de suite agrippée :
"Si une roquette peut nous tomber dessus à tout moment, à quoi bon faire la vaisselle ?"
Voilà qui donne le ton.^^

Plus chroniques que nouvelles, Etgar Keret nous régale de ses anecdotes et récits sur le quotidien à Tel-Aviv, nous parlant de ses contemporains, une belle galerie de portraits vivants, et nous plongeant dans l'intimité de sa famille, une sacrée brochette de personnages hauts en couleur, tout en partageant avec nous sa vie d'écrivain qui l'entraîne au gré de lectures et dédicaces dans des foires internationales.

Si, au début, j'ai un peu grimacé comme à la lecture de nouvelles, la forme du récit en étant très proche, et que j'ai eu cette impression désagréable de passer d'une histoire à l'autre sans transition, une fois surmonté le premier tiers du livre, je suis passée en mode hyène hilare, m'esclaffant même dans le métro à plusieurs reprises. Ironie mordante, dérision, j'ai adoré son écriture sans fanfare, presque désinvolte et qui pourtant fait mouche, et la façon subtile dont il campe les situations et parle des problèmes de son pays et de ses contemporains sans en avoir l'air. Je me suis attachée à lui et à sa petite famille, son fils, sa femme, sa mère, mais aussi à son entourage, les chauffeurs de taxis entre autres, et j'en passe. 

Et puis finalement, j'ai eu l'impression véritable de lire un récit unique qui se déroule sur 7 ans, et non pas juste des anecdotes ici et là, surtout avec le fils qu'on voit grandir, un fils au sens de la réparti effrayant (ce livre vaut le détour rien que pour ça^^).
C'est un récit qui balaie un peu de tout, sa vie de famille, sa vie d'écrivain, ses contemporains (aah les chauffeurs de taxi), mais aussi les petits tracas du quotidien auxquels on peut parfaitement s'identifier et qui apportent beaucoup de légèreté de ton et un peu de superficialité dans un contexte qui ne semble pas s'y prêter.
Un récit qui déborde de vie et d'humour malgré le contexte de conflit permanent, un vrai régal et une sacrée réussite !

J'ai fortement apprécié également la brièveté de chaque chronique dont la chute ne laisse jamais sur sa faim et boucle la boucle, à l'inverse de certaines nouvelles qui vous laissent dans l'incertitude ou en équilibre sur un fil (raison pour laquelle j'ai parfois du mal avec les nouvelles). Et toutes sont véritablement savoureuses ! Il n'y en a pas une dont je ne me souviens pas avec le sourire aux lèvres !

En parlant des dédicaces d'auteur :
"Ce n'est pas parce qu'il en est l'auteur qu'un bonhomme doit s'arroger le droit de venir griffonner mon exemplaire personnel - surtout s'il a une écriture aussi moche que celle d'un médecin et qu'il a l'air de tenir à utiliser des mots difficiles, le genre qu'on doit chercher dans un dictionnaire pour découvrir qu'il signifie tout bonnement "En espérant que ça vous plaira"."

En parlant de ses tentatives pour perdre du poids :
"Quiconque se ferait pincer à traiter son chien ou son chat aussi mal que tu traites ton propre corps aurait depuis longtemps été jeté en prison, a-t-elle ajouté en m'aidant à m'asseoir. Prends exemple sur moi... Fais attention à ce que tu manges, fais du yoga."
"Entre-temps, avait-elle ajouté, elle me conseillait de m'attaquer à quelque chose d'"un peu moins ardu que le yoga". Du fait qu'elle n'avait pas fourni d'autres détails, je perçus comme une odeur familière d'origan dans son énigmatique recommandation et me remis à m'attaquer à de gargantuesques parts de pizza."
"Il ne subsistait plus sur la page, en dessous de toutes ces biffures, que la marche rapide. Je me suis hâté de barrer le mot rapide et d'ajouter un point d'interrogation après marche."

J'ai envie de dire, merci, merci d'avoir partagé cette tranche de vie, ces souvenirs de famille, ces instants de vie hors du commun dont je me suis délectée et qui m'auront tour à tour touchée et follement amusée.
Que du bonheur en somme !^^

8 commentaires:

  1. Se transformer en hyène hilare, dire m* à la vaisselle : voilà de l'argument :-) (et il en faut pour me donner envie de lire des nouvelles israéliennes...).

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    1. Il faut dire que la 4è de couv' m'avait bien vendu ce recueil aussi car je n'étais moi-même pas convaincue d'être sensible à des chroniques autour de Tel-Aviv.;-) Et je suis plus que ravie d'avoir cédé à la curiosité tout de même.

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  2. Tu vois que ça peut être très bien la forme brève ! Longtemps que j'en suis convaincu de mon coté mais je suis ravi de constater que tu t'en rendes enfin compte ;)

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    1. Je n'ai vraiment rien contre la forme brève. Ce qui peut m'user en revanche, c'est d'ingurgiter plein de courts récits à la suite en une fois - trop d'univers et de semi-intrigues cul-sec, ça peut créer un effet "overdose de lecture". Sans parler des nouvelles dont la chute laisse parfois dubitatif.
      Ce n'est pas le cas de tous les recueils de nouvelles heureusement, j'ai eu de très bonnes surprises déjà, c'est pourquoi j'ose encore m'y aventurer de temps à autre, mais d'une manière générale, je préfère quand même le "confort" des romans.:-)

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  3. Tu m'as donné envie de le lire!

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    1. Ah ben ça me fait plaisir, tiens !;-) En tout cas, c'est un livre que je recommande chaudement !

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  4. Yes! Tu as aimé! Un de mes grands bonheurs de lecture, un seul défaut : trop court!!! ^_^
    Nouvelles du chat : oui, le froid arrive, pour l'instant elle est dans le garage (avec le bazar...) et peut sortir à sa guise. Comme cela risque de durer encore des semaines (snif) je songe à la rapatrier au chaud là où je suis, mais hors de son territoire... Cruel dilemme...
    Côté maison, les vieilles maisons offrent des tas de surprises. D'où une dalle sur la moitié de la maison (pas prévu au départ..., mais le carrelage risquait de ne pas tenir) et un faux plafond (l'existant n'était même pas horizontal!) Découverte de double cloison, etc... Pas de lingots pour l'instant, hélas, ça aurait aidé.
    Donc toujours pas d'ordi ou internet.

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    1. C'est vrai que je n'aurais pas été contre le fait que le récit dure quelques années de plus ! Peut-être une suite un jour ?
      Bon, sacré chantier ton affaire ! Ouhlaaa, ça va me paraître long à moi aussi ces semaines ! Quoique ma PAL est sauve pendant ce temps.^^ En tout cas, j'adore suivre tes chroniques "suivi des travaux" et "nouvelles du chat" ici, chez toi, ou sur FB.^^

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